Comprendre le féminicide

memorial feminicide CFP 2022

Mémorial CFP en hommage aux victimes de féminicides, janvier 2022

TW : féminicide, viol, violence

Féminicide : l’émergence d’un terme à l’historique bien rempli

Le terme féminicide fait son apparition en français qu’au XIXème siècle alors qu’on trouve ses précurseurs “femmicide” ou “femicide” dans la littérature du XVIIème et du XVIIIème siècle.

Qu’est ce qu’un féminicide?

Bien que faisant souvent référence aux assassinats de conjoint.e.s, le terme féminicide désigne une personne assassinée de genre féminin. Le terme a été popularisé au début des années 1990 par deux écrivaines britanniques, Jill Radford et Diana Russel lors de la publication de l’ouvrage Femicide, The Policitc of Woman Killing soit en français “ Feminicide, l’aspect politique du meurtre des femmes”. Ce mot n’entre au petit Robert qu’en 2015.

Il émerge dans les médias français début 2018, lorsque Jonathann Daval avoue le meurtre de sa femme, survenu en octobre 2017. C’est aussi cette affaire qui le rattache au meurtre d’une conjointe.

Côté étymologie, le terme est construit de la même façon qu’“homicide”. En latin, “homo” désigne les humains sans distinction de genre alors que “fēmĭna, æ” fait référence aux personnes de genre féminin. Le suffixe “cide” du latin cædo, cĕcīdī, cæsum, cædĕre signifie frapper, battre, abattre, tuer ou encore massacrer.

Enfin, notons que le féminicide est un crime sexiste. La victime, qu’elle soit femme, jeune femme ou enfant est tuée en raison de son genre.

Les différentes typologies du féminicide

Selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), il existe quatre catégories de féminicides : le féminicide intime, le féminicide non intime, le crime d’honneur et le crime de dot.

Lors d’un séminaire de l’UNODC (l’Office des Nations unies contre la Drogue et le Crime) sur le sujet, onze formes de féminicides ressortent incluant les quatre citées ci-dessus. La pluralité de catégories montre que si le féminicide est lié au genre de la victime, il ne se limite pas aux meurtres sur conjoint.e.s.

Pour exemplariser, les meurtres de femmes accusées de sorcellerie sont des féminicides. L’assassinat de Maelys en 2017 ou plus recemment le double féminicide dans un contexte de violences conjugales en janvier dernier en sont aussi.

Le comptage des féminicides en France 

Vous êtes certainement familier.e.s du comptage des féminicides en France. Que ce soit par un post sur les réseaux sociaux ou dans d’autres médias, ce chiffre qui augmente presque tous les jours est toujours aussi glaçant. Voici ses origines et son fonctionnement. 

Les débuts du comptage avec FPCE 

En 2016, une bénévole d’un groupe Facebook féministe commence à compter les féminicides. Quelques mois après, elle arrête car la mission est moralement trop dure à supporter. Le groupe “Féminicides par compagnons ou ex” voit alors le jour.

FPCE a pour but de soutenir les familles des victimes et de faire reconnaître leur mort comme un féminicide. Pour mener ce travail titanesque, une grande équipe part à la recherche des féminicides dans les médias locaux. Pour les trouver, iels utilisent des mots clés (tels que “femme disparue”, “drame conjugal”, “femme morte” etc.). 

En 2019, Caroline de Haas, l’une des fondatrice du mouvement #NousToutes, décide de relayer le comptage réalisé par FPCE. Ceci donnera une meilleure visibilité au mouvement et au comptage des féminicides. De nombreux autres médias relaient leurs chiffres. Leurs chiffres deviennent même une base pour le Grenelle des violences conjugales en septembre 2019. 

La polémique avec le collectif #NousToutes

Bien qu’étant le premier collectif à relayer et offrir une visibilité sans précédent au comptage de FCPE, #NousToutes décide de ne plus se baser sur ce comptage à partir de janvier 2022. 

En effet, comme expliqué précédemment, un féminicide est l’assassinat d’une personne de genre féminin. Or, FCPE n’intègre pas tous les homicides de femmes mais seulement ceux ayant eu lieu dans le cadre conjugal. Par conséquent, ce comptage invisibilise beaucoup de femmes telles que des personnes hors d’un couple, des femmes transgenres, des enfants, et des travailleuses du sexe. 

Aujourd’hui, se pose la question de savoir si le comptage ne doit pas intégrer d’autres victimes de crimes sexistes tel que les hommes transgenres assassinés pour cette raison, les travailleureuses du sexe ainsi que les infanticides conséquents au meurtre sur conjoint. C’est le choix qu’ont fait les colleur.euse.s de CFP (Collectif Féminicides Paris) le 9 janvier dernier lors de l’affichage du mémorial parisien. 

Féminicide, quelles statistiques ?

Avant d’aborder les statistiques des féminicides à proprement parler, penchons-nous sur la part de femmes dans le total des homicides volontaires.

Comme le montre le graphique ci-dessous, il y a largement plus d’hommes que de femmes tués par homicide volontaire.
Par contre, dans la sous-catégorie des homicides familiaux, et plus particulièrement conjugaux, il y a beaucoup plus de femmes.

Autrement dit, les femmes sont moins souvent victimes, sauf dans le cas des homicides familiaux et conjugaux.

graphique feminicide homicide
Source ONUDC 2019

Nous l’avons vu, les méthodes de recensement des féminicides diffèrent, en toute logique les résultats aussi. Voici ci-dessous les résultats les plus récents issus des trois principaux comptages des féminicides en France pour l’année 2021.

Source et année de recensementNombre de féminicidesMéthode
Ministère de l’intérieur – 2020102Morts violentes au sein du couple recensées par les services de police et unités de gendarmerie
Libération – 2017 à aujourd’hui (en cours)Total non communiquéRecensement et présentation visuelle des cas mentionnés dans la presse nationale ou locale depuis janvier 2017  
Collectif FPCE – 2021compagnon ou ex : 113 féminicides non conjugaux : 19 Comptage issu des articles de presse traitant des affaires de féminicides conjugaux en France

Si vous êtes victime ou que vous connaissez des victimes de violences, voici des ressources pour vous aider.

Sources 

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